L’exposition FORCES VIVES est née de la découverte de photographies prises par Lee Miller lors de sa visite dans les années 1930 et du désir très fort de travailler avec l’une des artistes des plus fascinantes : Claire Tabouret.
Dans son texte introductif sur Lee Miller (paru aux Editions Delpire), Kate Winslet utilise
comme titre « Force vive » pour décrire celle dont elle a interprété le rôle à l’écran. En
dialogue avec les archives Lee Miller, nous avons pensé que cette appellation pouvait
clairement s’étendre à Claire Tabouret et, au-delà, au facteur Cheval.
Artiste à la destinée incroyable, Lee Miller est tout à la fois muse des plus grands artistes, mannequin et photographe correspondante de guerre. A l’été 1937, Lee Miller qui vit alors en Egypte, visite l’Europe en compagnie de Roland Penrose, artiste surréaliste et commissaire d’expositions, rencontré quelques semaines plus tôt.
Le couple visite le sud de l’Angleterre, avant de traverser la France pour rejoindre Dora Maar, Pablo Picasso, Paul et Nusch Eluard à Mougins sur la Côte d’Azur.
Sur la route, ils s’arrêtent à Hauterives pour découvrir le Palais idéal, où Lee réalise une série de photographies. En octobre 1937, Lee Miller retourne en Egypte loin de Roland Penrose qui rentre en Angleterre. Deux albums photo seront réalisés en souvenir de ce premier été passé ensemble, conservant ainsi précieusement toutes les images du Palais idéal à l’intérieur. Exposées pour la première fois, ces photographies racontent une page de l’histoire de l’art et de la photographie au Palais idéal et dévoilent le lien intime et personnel qui a uni l’œuvre du facteur à l’une des plus célèbres photographes du XXe siècle.
Le projet de Claire Tabouret pour le Palais idéal est une expérience du temps. Né pendant le confinement, le dialogue avec l’artiste autour du facteur se traduit par la création de plusieurs oeuvres spécialement conçues pour faire écho à l’histoire du facteur Cheval.
Animée par cette sensibilité au temps qui passe et à la vulnérabilité que suscitent les relations humaines, la pratique artistique de Claire Tabouret est rythmée entre des périodes d’urgence productive et de réflexion silencieuse, animée par des patines de couches, de tissus et de coups de pinceau amples. Sa palette est suspendue quelque part dans l’éther entre les teintes synthétiques du maquillage et les tons tamisés de la terre, faisant référence simultanément aux ingrédients naturels et artificiels de la représentation.
Entre autres créations pour l’exposition, Claire Tabouret produit pour la première fois une
tapisserie tissée spécialement dans l’un des plus prestigieux ateliers d’Aubusson : l’Atelier Pinton. Son tissage a nécessité 9 mois de travail.
Deux autels hommage à Lee Miller ont été élégamment réalisés spécialement pour l’exposition. Fruit de la collaboration de Claire tabouret et de son compagnon Nathan Thelen, chaque pièce unique est fabriquée en acajou africain sculpté à la main et comporte un bougeoir en laiton. Les bougies allumées donnent une mystérieuse impression de profondeur, suggérant que la lumière émane directement de l’autel. Le vitrail fusionné est soutenu par un miroir argenté qui reflète la lumière des bougies et souligne la nature éthérée des deux représentations de Lee Miller, dont l’une s’inspire d’un portrait d’elle à l’âge de 11 ans.
A l’extérieur dans le jardin attenant au Palais idéal, Claire Tabouret crée une fontaine hommage à Philomène, deuxième épouse de Ferdinand Cheval, elle devient la mère de Alice à l’âge de 41 ans. Présence discrète aux côtés du facteur Cheval, Philomène accompagne son époux dans son rêve et lui permet de le réaliser par tous les moyens dont elle dispose qu’ils soient financiers ou émotionnels. Grand amour du facteur Cheval, elle décède à l’âge de 76 ans – deux après l’achèvement du Palais. Humble et discrète, elle figure grâce à Claire Tabouret aux côtés de l’œuvre de son célèbre époux, le regard tourné vers son Palais idéal.